Le 3 mai, l’Observatoire économique de France bois forêt a diffusé les résultats de son indicateur des prix de ventes de bois en forêt privée produit par la Société forestière de la Caisse des dépôts, en partenariat avec l’Association des sociétés et groupements fonciers et forestiers (Asffor) et les Experts forestiers de France (EFF).
Les données de base de l’indicateur sont issues des ventes groupées de bois sur pied réalisées par EFF et portent sur les marchés 2022. "Les experts forestiers, membres d’Experts forestiers de France, organisent chaque année des ventes groupées de bois sur pied sur l’ensemble du territoire métropolitain pour le compte de leurs clients privés ou institutionnels. En 2022, à côté d’autres modes de vente (gré à gré et contrats notamment), ils ont mobilisé et mis sur le marché lors de ces ventes groupées plus d'1,4 million de m3 en léger recul sur la dernière année, notamment en douglas", indique l’interprofession nationale, qui précise que les résultats sont donnés corrigés des écarts régionaux.
Un prix au plus haut niveau depuis 2001
"L’offre 2022 est stable pour de nombreuses essences (chêne, hêtre notamment) par rapport à 2021 et en retrait pour plusieurs résineux (douglas et épicéas). Le marché est toujours actif en feuillus avec plus de 90 % des volumes vendus mais plus discuté en résineux (80 %), particulièrement en douglas. L’indice général du prix de vente des bois sur pied en forêt privée progresse de 17 % en 2022 après la très forte hausse de 34 % en 2021. Le prix du bois, toutes essences, est de 94 €/m3 (contre 81 €/m3 l’année précédente), c’est le plus haut niveau atteint depuis 2001, début des analyses de l’indice". L'analyse de l'Observatoire économique de France bois forêt montre que globalement l’année 2022 s'inscrit dans la continuité de la tendance de 2021, avec une augmentation significative du prix moyen des ventes de bois sur pied.
Record pour le chêne, redressement pour le hêtre
Dans le détail, le chêne a enregistré un nouveau record l'an dernier avec un prix moyen qui atteint 271 €/ m3 (pour un volume unitaire de 1,7 m3) soit une hausse de 20 % par rapport à l’année 2021. "Elle confirme la tendance enregistrée depuis 2012, et ce malgré des facteurs contradictoires : une récolte nationale en baisse même si les volumes mis en marché par les Experts Forestiers de France sont stables ; le dynamisme des débouchés du chêne : tonnellerie, parquets, menuiserie, charpente, aménagements extérieurs ; l’exportation de bois bruts vers l’Asie, forte au premier semestre alors qu’au deuxième semestre les exportateurs étaient absents des salles de ventes", commente France bois forêt. "En 2022, 28 % des volumes ont été commercialisés sous la labellisation UE (contre 20 % en 2021)".
Comme en 2021, les prix du hêtre ont quant à eux poursuivi leur redressement. "Pour la deuxième année consécutive, les cours du hêtre continuent leur progression pour revenir au niveau de 2014-2015 et dépasser la moyenne des 15 dernières années", souligne FBF. "Le prix s’établit à 52 €/m3 (pour un volume unitaire moyen de 1,7 m3), contre 46 €/m3 en 2021, en hausse de 11 %. Les tensions actuelles sur le marché du chêne et les difficultés d’approvisionnement qui en découlent encouragent les acheteurs à reporter leurs achats et substituer des débouchés avec d’autres essences. De même que les exportations de billes et les commandes sur les meilleures qualités (déroulage), et la meilleure valorisation des bois de qualité secondaire, participent à l’augmentation des prix. Toutefois, les prix dans l’est de la France sont impactés par la poursuite des dépérissements, conséquences des derniers étés secs et chauds, conduisant à une dégradation de la qualité des bois".
Le peuplier a quant à lui poursuivi sa hausse en 2022 (+22 %), avec un prix de vente moyen qui s'élève à 58 €/m3 (pour un volume unitaire moyen de 1,35 m3). "Cette tendance s’inscrit dans un contexte de tension sur la ressource. [...] Les disparités régionales observées sont directement la conséquence de la proximité ou non des unités de transformation : En Rhône-Alpes, la proximité de l’Italie très consommatrice, tire les prix au-dessus de la moyenne nationale ; en Picardie, la mise en service de nouvelles usines de transformation commence à avoir un effet bénéfique pour les producteurs".
Résineux : seul le douglas stagne
Dans ce contexte d'augmentation générale des cours, le douglas fait quant à lui figure d'exception puisqu'il a enregistré une diminution de son prix moyen de 2 % en 2022, après six années de hausse. "Le douglas a souffert d’un désintérêt massif des acheteurs sur le 2e semestre, du fait d’une surestimation des besoins, tout particulièrement à destination des grandes surfaces de bricolage et par la fermeture des marchés à l’export. La baisse du pouvoir d’achat des consommateurs a entraîné un report des projets à une date ultérieure ou vers des bois moins onéreux. Cette demande en berne entraîne une forte baisse des volumes vendus : après le record de 2021 à 415 000 m3, les volumes vendus retombent autour de 250 000 m3. Le prix moyen s’établit ainsi à 87 €/m3 en 2022 pour un arbre d'1,2 m3 de volume unitaire moyen, contre 89 €/m3 en 2021. La disparité régionale reste de mise, mais, fait notable, pour la première année, le prix du douglas en Occitanie est supérieur à la moyenne nationale. Cela s’explique certainement par une concurrence exacerbée dans cette région entre acteurs traditionnels et nouveaux. Il semble donc que la baisse du marché soit plus conjoncturelle que structurelle, les qualités du douglas étant bien reconnues et la demande en croissance".
Pour un épicéa commun de 0,9 m3 de volume unitaire moyen, le prix a connu une deuxième année consécutive de forte hausse atteignant 59 €/m3 en 2022 contre 44 €/m3 en 2021, "soit une progression de 34 %", précise FBF. "Cette hausse s’explique par la forte demande pour les bois destinés à la construction et à l’emballage et par la raréfaction de la ressource du fait de l’épidémie de scolytes. L’épicéa retrouve ainsi son cours de 2013. Les volumes mis en vente par appel d’offres sont en baisse et essentiellement commercialisés dans le Massif central et Midi-Pyrénées. Sans surprise, du fait de la crise des scolytes, les volumes mis sur le marché dans le quart nord-est de la France sont assez faibles. Par ailleurs, les disparités régionales de prix persistent entre le Massif central et le reste de la France où les prix sont plus élevés".
En 2022, le prix moyen de l'épicéa de Sitka atteignait quant à lui 67 €/m3, en hausse de 20 %. "À l’instar des essences résineuses, cette hausse cache une disparité annuelle entre les prix du premier semestre plus élevés qu’au deuxième semestre. Comme l’an passé, l’épicéa de Sitka a bénéficié de la bonne activité économique et de la diminution de l’offre de bois blancs au niveau national suite à la crise des scolytes sur l'épicéa commun. Les prix de l’épicéa de Sitka reflètent principalement le marché de la région Bretagne qui, à elle seule, propose 60 % de la ressource nationale, et aussi celui du Limousin".
Pour le sapin pectiné, le prix moyen s'élevait à 54 €/m3, en hausse de près de 11 % par rapport à 2021 (49 €/m3). "Les industriels ont reporté leurs achats sur le sapin pour répondre au besoin de bois blancs résineux et frais et pour compenser la diminution des volumes d’épicéa mis en marché depuis la crise des scolytes. Cette situation permet d’envisager que les cours du bois du sapin pectiné seront encore à la hausse les prochaines années avec son utilisation en substitution de l’épicéa dans certaines catégories de produits transformés", précise FBF.
Du côté du pin maritime, le prix moyen a poursuivi sa hausse pour atteindre 56 €/m3 (+22 % par rapport à 2021). "Le prix du pin maritime progresse de façon régulière depuis le début des années 2010, une fois les effets de la tempête 2009 passés", indique FBF. "Toutes les catégories de bois augmentent et toutes les régions sont concernées par cette tendance. Pour la deuxième année consécutive dans les ventes par appel d’offres organisées par les Experts forestiers, il s’est vendu plus de pin maritime hors sud-ouest que dans le massif aquitain du fait d’un manque de matière dans le Sud-Ouest. De plus, après les grands incendies de l’été, les ventes d’automne par appel d’offres prévues dans le sud-ouest ont été annulées afin de permettre la récolte des bois sinistrés dans les meilleures conditions possibles. La carte régionale des prix montre clairement que le marché du pin maritime est en fait composé de deux segments distincts : le Sud-Ouest où les prix sont toujours les plus élevés, et le centre-ouest de la France avec des prix plus faibles, bien qu’en hausse".
L'augmentation a été encore plus importante pour le pin laricio en 2022 (+34 %), avec un prix moyen qui atteint 42 €/m3 pour un arbre de volume unitaire moyen de 0,4 m3 (médiane des ventes). "Là aussi, il s’agit du cours le plus élevé jamais observé depuis le début de l’indice", commente FBF. "Cette hausse s’observe sur l’ensemble des produits mis en vente, quel que soit le volume unitaire, avec une tendance plus marquée sur les volumes unitaires les plus élevés. Il semble que le pin laricio commence à trouver une place sur le marché, du fait de besoins en bois importants en 2022 notamment en bois industriel (panneaux et palette). Les volumes mis en vente approchent les 50 000 m3, en hausse régulière ces dernières années. Cela traduit certainement la montée en puissance des plantations réalisées il y a 30 à 40 ans".
En 2022, le pin sylvestre a lui aussi atteint son cours record depuis la création de cet indice, avec un prix moyen à 37 €/m3 pour un volume unitaire moyen de 0,8 m3. "Il faut noter que le pin sylvestre est une essence résineuse bien représentée sur le territoire national, avec des lots vendus dans près de 70 départements, et de fortes disparités de prix, de l’ordre de 50 %. En 2022, la majeure partie des volumes a été commercialisée dans le quart nord-ouest où les prix sont les plus élevés, la part des volumes vendus dans le Massif central et l’Auvergne étant en forte baisse. Les dépérissements observés expliquent aussi les écarts de prix importants entre les départements : l’Allier étant par exemple fortement impacté par ce phénomène."