Chaque édition successive de la Ligna ancre davantage la révolution numérique dans la réalité. Et comme dans toutes les révolutions, les évolutions ne vont pas forcément dans le sens initialement prévu, mais ouvrent toutes sortes d’horizons qui pourraient même affecter à terme le salon mondial Ligna qui les a suscités et portés.
Une fois de plus, loin d’habiter pleinement l’immense parc des expositions de Hanovre, et sans même compter dans la ville parmi les grands salons de référence, la Ligna a accueilli plus de 90.000 visiteurs de 100 pays, pour 1.500 exposants environ de 50 pays. La surface d’exposition nette a augmenté légèrement par rapport à la dernière édition mais en gros, le concept est stable, sans concurrents sinon ceux que la Deutsche Messe se crée un peu partout dans le monde. Ceux-ci demeurant dans l’ensemble de moindre ampleur.
4.0
Il y a quelques années, le mot d’ordre gouvernemental d’industrie 4.0 a donné une nouvelle bouffée d’oxygène à l’événement, fixant un nouvel horizon, celui de la production connectée au sens large. Un vrai ressort commercial pour des fabricants qui vont pouvoir proposer de remplacer le parc installé par une nouvelle génération de machines connectées, ou à défaut de rééquiper des machines plus anciennes. À la Ligna, cette nouvelle orientation spectaculaire impliquait des surfaces nettes impressionnantes pour montrer l’interaction de lignes de production, comme cela a été le cas du moins sur les immenses stands des leaders Homag, Biesse, SCM et Weinig qui mènent la danse avec quelques autres.
L’entreprise numérique
Cependant, lorsque le patron de Homag redéfinit le leader allemand et mondial de la machine à bois comme une entreprise numérique, et non plus comme un fabricant de machines à bois, un cap est franchi. Il sera peut-être demain de moins en moins nécessaire de convoyer à Hanovre des dizaines de machines, de les faire tourner en interconnexion. D’autant que l’argument qui s’impose actuellement, c’est que le fournisseur peut désormais créer virtuellement une ligne de production dans une configuration de site donnée, la faire tourner, la faire visiter, en étudier tous les rouages, et la vendre. Ensuite, la fabrication effective, la livraison, le montage, la mise en route, l’optimisation, c’est presque une activité annexe.
Vers une Ligna virtuelle ?
Bien sûr, les organisateurs de salon vont toujours se dresser contre toute remise en cause de leur business model. Les gens ont besoin de se rencontrer et rien ne vaut cette possibilité unique au monde de toucher les machines de tout le monde, dit-on. La Ligna a encore de beaux jours devant elle, certes. Mais avec son concept de production connectée, elle a engendré quelque chose qui risque d’aller bien au-delà de ce qu’elle espérait générer. Il lui faudrait penser dès maintenant à autre chose, sans quoi, demain, le monde numérique va vider les halls. Grosso modo, on pourra passer commande d’une ligne de production par internet.
La Ligna a émané d’un salon plus généraliste et rien n’est éternel, si la machine devient virtuelle, la Deutsche Messe pourra inventer une autre formule sans doute liée au bois. Pas tant dans les accessoires où le salon Interzum, qui fonctionne en synergie de fait avec la Deutsche Messe de Hanovre, mais sous la houlette de la foire de Cologne, caracole à plus de 70.000 visiteurs pour l’édition 2019. Plutôt en intégrant ce que les clients font avec les machines à bois. Mais on n’en est pas là […]
Photo : Chaque édition successive de la Ligna ancre davantage la révolution numérique dans la réalité.