La Cites (Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées), a décidé en novembre 2022, lors de la COP19 tenue à Panama, d’ajouter à la liste des espèces protégées plusieurs essences de bois en annexe II, contraignant leur commercialisation par la présentation d’un permis.
Les genres botaniques d’Afrique concernés avec un délai de mise en application de 90 jours sont :
- Pterocarpus spp., regroupant le padouk d’Afrique et le muninga (et complétant le vêne, déjà inscrit) ;
- Khaya spp., regroupant l’acajou d’Afrique et l’acajou cailcédrat et l’acajou umbaua ;
- Afzelia spp., regroupant le doussié et le pachyloba.
Les genres botaniques d’Amérique du Sud concernés avec un délai de mise en application de 24 mois sont :
- Handroanthus spp., représentant l’ipé ;
- Roseodendron spp., représentant le primavera ;
- Tabebuia spp., représentant l’apamate (ancien nom de l’ipé) ;
- Dipteryx spp., représentant le cumaru.
« La proposition de passage du pernabouc (Paubrasilia echinata) de l’annexe II à l’annexe I – interdisant totalement l’exploitation – n’a pas été validée en raison d’une forte mobilisation des luthiers et archetiers qui ont obtenu le renvoi du vote après une analyse approfondie de cette essence par un groupe de travail spécialisé », explique Véronique Vanhersecke, à la tête du cabinet VHK Bois Expertise et membre de la société des experts bois. « Toutes ces essences ont été soumises au vote à la suite d’une proposition du représentant de l’Union européenne, laquelle définit plusieurs annexes dont l’annexe D qui est constituée d’espèces qui ne sont pas inscrites à la Cites, mais dont l’UE considère que les volumes d’importation justifient une mise sous surveillance. Cette annexe D comporte entre autres : l’okoumé, le sapelli, le moabi et le wengé. Concrètement, sur le terrain, l’obtention d’un permis Cites est une opération contraignante pour les producteurs. Les importateurs doivent également faire face à des lenteurs administratives pour la validation de leur dossier lors du passage en douane. La demande d’un permis Cites est bien souvent confondue par les administrations et consommateurs comme étant une interdiction d’exploitation et d’utilisation. Les mesures de protection de la Cites des espèces en danger (telles que les éléphants, les rhinocéros, les pandas…) sont évidemment louables et méritent un soutien inconditionné. Cependant, les dispositions de contrôle risquent de mettre un terme définitif à la commercialisation des essences visées, même lorsqu’elles sont issues de forêts gérées durablement. Pour rappel, la gestion durable des forêts repose sur un équilibre légalement reconnu, à différents niveaux : économique, assurant des revenus aux populations locales ; social avec le développement d’infrastructures – eau potable, écoles, centres médicaux… –, culturel en respect des droits des populations locales et d’arbres ou de zones protégées, environnemental par le maintien de la forêt et la protection de la faune et de la flore. Sur le plan économique, les ordres de grandeurs de la rentabilité d’un terrain varient selon son exploitation : forêt naturelle gérée durablement : 500 €/ha/an – un arbre/ha/25 ans – ; plantation d’eucalyptus : 1 500 €/ha/an ; agriculture du soja : 2 500 €/ha/an ; plantation de palmier à huile : 3 500 €/ha/an. Pour ces raisons de productivité, la conversion des forêts en terres agricoles risque indirectement d’être accélérée par ce dispositif initialement conçu pour protéger la biodiversité ».