Alain Jacquet, dirigeant de la coopérative Forêt et bois de l’Est (F&BE) résume la situation actuelle en quelques mots éloquents : «Ces trois-quatre semaines, nous sommes devenus les pompiers de nos entreprises». Si les activités de sylviculture et notamment de reboisement et de gestion forestière perdurent, l’activité d’exploitation de la coopérative est en effet en grande partie suspendue, en résineux et en bois d’industrie notamment. «Les usines de panneaux ont fermé, les usines de papier tournent au ralenti, les scieries ont quasi-suspendu leurs approvisionnements», rappelle Alain Jacquet. En temps normal, les mois de mars, avril et mai sont des périodes d’importantes livraisons aux scieries résineuses. Au regard de cette activité suspendue, la coopérative chôme 60% du temps. 70% de son activité d’exploitation forestière sont arrêtés.
Or, bien avant l’état d’urgence sanitaire, F&BE, avec tous les producteurs et entreprises de l’Est, avait déjà endossé un rôle de sauveteur, cette fois de la forêt et de la filière résineuses, face à l’épidémie de scolytes de l’épicéa qui entame sa troisième saison ! Parmi les mesures prises, rendu possible par l’aide à la mobilisation et à la commercialisation des bois allouée par le Gouvernement, un partenariat F&BE-Smurfit pour la co-gestion de chargement de bois scolytés de la gare de Raon-l’Étape (88) vers l’Aquitaine, via l’opérateur ferroviaire VFLI. Cette mesure, qui était en passe de s’étendre à la gare d’Aillevillers (70) au moment de la crise du Covid-19, concerne des bois déjà secs.
Or l’urgence est renouvelée, avec les retards d’exploitations qui interviennent en cette période d’état d’urgence et l’arrêt des outils de transformation. Elle est maintenant absolue de sauver les bois encore frais et sains exploités ou à exploiter issus des nombreux chablis hivernaux et des poches de scolytes à évacuer, ce qui permettra à la fois de garder des flux de matière pour l’avenir et de préserver les épicéas restant sur pied (en les protégeant d’envols massifs par ces exploitations d’urgence). Un projet d’aire collective d’arrosage avait été évoqué lors d’une réunion interprofessionnelle le 6 mars, appelée notamment des vœux de F&BE. «Les milliers de m3 bord de route truffés d’insectes prêts à s’envoler et les chablis constituent une véritable bombe à retardement», explique Alain Jacquet. «Tout doit être mis en œuvre pour tendre vers cet unique objectif : des espaces de stockage arrosés créés en concertation entre les producteurs et les transformateurs, pour aider les entreprises et freiner le scolyte.» L’interprofession Fibois Grand-Est est en train de passer en revue les possibilités de sites de stockage. Organiser la mise au frais des bois d’épicéas sains le temps de la pullulation de scolytes, de sorte que les scieurs puissent se concentrer sur les bois atteints à transformer d’urgence uniquement, est une tâche collective que la situation d’état d’urgence rend à la fois difficile et encore plus urgente !
Première Transformation