L’Appel de la forêt, documentaire d’Hervé Haon, était projeté au cinéma Le Casino à Lavelanet samedi 24 mai. Une première officielle sur grand écran. Le film a mis quatre années pour passer de l’ombre des frondaisons à la lumière des salles obscures.
Dans la grande salle du cinéma de Lavelanet, près de 200 personnes ont répondu ce samedi à L’Appel de la forêt. Les occasions de voir un film consacré à ceux qui travaillent en forêt, aux différentes façons de récolter le bois, à la manière de gérer une parcelle, ou encore aux enjeux auxquels se trouve confrontée la filière bois, ne sont pas si nombreuses. Alors, parmi les spectateurs, ont pris place de très nombreux forestiers venus d’Ariège, d’Aude et même des Hautes-Pyrénées. Des bûcherons, débardeurs, exploitants, scieurs, techniciens ou ingénieurs forestiers, qui avaient croisé, ou non, Hervé Haon lors du tournage.
Quand, en 2015, ce dernier se lance à 67 ans dans l’aventure de L’Appel de la forêt, des aventures il en a connu bien d’autres. Le plus souvent dans différents bouts du monde, fort éloignés des forêts alpines ou pyrénéennes. Mais voilà qu’après avoir bourlingué sur le continent africain pour des entreprises forestières, puis caméra à la main tout au sud du continent sud-américain pour réaliser des films pour Connaissancesdu monde, Hervé Haon a retrouvé les chemins de la forêt française, qu’il avait professionnellement fréquentés dans sa prime jeunesse en Auvergne, lui l’originaire du Puy-en-Velay. L’exploitation dans les forêts de montagne le passionne. Le débardage d’une coupe qu’il réalise lui-même sur le plateau de Sault, dans l’Aude, quelques mois auparavant, lui permet de rencontrer des gens du métier. «Des gens sincères, des gens vrais qui parlent clair mais n’ont jamais la parole» dit-il alors à Valérie Mainchain, sa compagne et la productrice du film, présente à Lavelanet.
Enjeux forestiers, industriels et économiques mis ennemis avant
Il délaisse son Timberjack pour reprendre sa caméra. Ses images mettent en valeur le travail, sa dureté, qu’il s’agisse de tomber des gros bois dans les pentes, de tirer le câble du tracteur pour remonter les grumes sur les pistes. Hervé Haon explore également un chantier de débardage à cheval, un autre par câble-mat, et même le débardage par hélicoptère. Le spectateur se trouve au plus près de l’action. Le dernier coup de tronçonneuse, le son des fibres qui s’arrachent, la masse musculaire du cheval de trait… Derrière l’objectif, l’oeil averti et connaisseur de Hervé Haon sait saisir au plus près les gestes, les efforts, les risques.
L’Appel de la forêt permet de voir et ressentir la réalité du labeur, et de la faire découvrir au grand public. Au-delà, Hervé Haon a aussi voulu embrasser dans la suite de son documentaire, les enjeux forestiers, industriels et économiques. La mécanisation de plus en plus prégnante avec l’exploitation par les abatteuses, les modes de gestion des peuplements forestiers, le réseau de scieries qui s’amenuise comme peau de chagrin, les grumes qui partent en Chine pour revenir en sciages. En franc-tireur, Hervé Haon livre ce qu’il pense dans le commentaire qui accompagne le film. Son point de vue, fait de réflexions personnelles et de données factuelles, soulève des questions et ne peut laisser indifférent. Hervé Haon n’a pas vu son film fini. La vie n’en a pas voulu ainsi. Malgré des imperfections, il laisse un beau documentaire.
Les hommes y ont leur place, la forêt et les arbres aussi. Les paysages et les lumières qu’il nous offre sont magnifiques. Hervé Haon était un amoureux de la forêt. «Je préfère rester dans l’éternité des forêts, sous leurs ombrages séculaires et rassurants » écrit-il à la fin du film. Quelque part au-dessus de Bélesta en Ariège, l’image s’envole entre sapins et mélèzes.
Photo : Hervé Haon pendant le tournage.
Voir notre édition verte, Le Bois International, Scierie, exploitation forestière N°22…