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Paris / Investir pour l’avenir : la filière rassemblée à l’orée de la Cop 21

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530 professionnels de l’ensemble de la filière forêt bois ont assisté le 5 novembre dernier, au Conseil économique, social et environnemental à Paris, à un colloque sur le thème du financement de la filière. Organisé par France bois forêt, France bois industries entreprises et l’Association des sociétés et groupements fonciers et forestiers dans le cadre de la préparation de la Cop 21, ce colloque avait pour ambition d’attirer l’attention sur la contribution de la forêt et de l’industrie du bois au stockage du carbone et sur l’intérêt d’investir dans cette filière au cœur des enjeux environnementaux actuels.

Investir dans la forêt, dans l’industrie de transformation, est un acte vertueux contribuant à la fois à la valorisation de notre patrimoine naturel, au développement de l’économie, notamment au niveau local, et à la réduction de nos émissions de gaz à effet de serre. On estime que la filière forêt-bois contribue à réduire de 20% les émissions de CO2 de la France, et pourrait en se développant aller jusqu’à 40%. En convaincre les investisseurs constituait la première partie du colloque, consacrée aux arguments des scientifiques et des politiques, tandis que la deuxième partie en après-midi explorait en miroir les voies financières possibles du point de vue des investisseurs potentiels.

Forêt, bois et carbone, l’équation gagnante

Le calcul de la réduction des émissions de CO2 dont la filière forêt-bois est actuellement à l’origine tient compte à la fois de l’absorption du CO2 par les arbres et le sol, du stockage du CO2 dans les produits bois et de la substitution des énergies fossiles par le bois-énergie, a expliqué Jean-Luc Peyron, responsable du Gip-Ecofor (groupe de recherche sur l’écologie forestière). «En extrapolant ces calculs en fonction de l’augmentation de température attendue et de son effet sur la croissance des arbres et sur les écosystèmes forestiers en général, même si l’on tient compte des nombreuses incertitudes, il apparaît clairement que dans les pays tempérés, augmenter la récolte de bois permettra d’actionner de nouveaux effets de substitution, d’éviter à moyen et long terme une réduction de la croissance ligneuse ainsi qu’une aggravation de la mortalité et des risques» certifie Jean Luc Peyron.

La prise en compte de la contribution de la forêt des milieux tempérés à la lutte contre le changement climatique dans le cadre du Protocole de Kyoto à partir de la troisième période d’engagement (2021-2030) la fera entrer dans les mécanismes de compensation des émissions à l’origine du marché du carbone. Encore faut-il que les spécialistes s’accordent sur les règles du calcul de la contribution de la forêt au «puits de carbone», et de l’impact du reboisement, du déboisement ou du changement de la sylviculture. «Ces règles sont en cours de révision», a expliqué Sylvie Alexandre, déléguée interministérielle à la forêt et au bois auprès des ministres de l’Ecologie et du Logement, «et elles sont complexes». Sylvie Alexandre a rappelé «la cohérence de ces négociations avec l’objectif que s’est donné la France d’une division par quatre de ses émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2050 et avec les différentes politiques mises en place : la stratégie nationale bas carbone, le programme national forêt/bois, la programmation pluriannuelle de l’énergie, la stratégie nationale de mobilisation de la biomasse. La filière forêt bois particulièrement concernée par toutes ces politiques, doit se les approprier en faisant preuve d’unité et de dynamisme».

Forêt finance, une équation moins évidente

Alors pourquoi y-a-t-il aussi peu d’investisseurs institutionnels en forêt ? s’est demandé Thibault de Saint-Priest, directeur général d’Acofi, plateforme de gestion de prêts directs à l’économie. «Les inconvénients de l’investissement forestier sont la trop longue immobilisation des sommes investies, la faiblesse des informations disponibles sur les performances espérées, le manque d’organisation du marché et la très faible disponibilité en certificats ISR (investissement socialement responsable*)… Augmenter l’attractivité du placement forestier passe par une gestion collective et des avantages plus clairs», selon lui.

C’est ce que propose le groupement forestier d’investissement (GFI) créé dans la loi d’avenir pour l’agriculture et la forêt afin d’attirer une partie de l’épargne des Français vers la forêt. L’actif de ce nouveau support d’investissement, est constitué, d'une part, de bois ou forêts, et, d'autre part, de liquidités ou valeurs assimilées. «Avec son statut de placement alternatif encadré par la directive AIFM, et les différentes garanties qui l’accompagnent (PSG, assurance incendie obligatoire…) il devrait rassurer et attirer les investisseurs non forestiers», selon Xavier Parain, secrétaire général de l’AMF (autorités des marchés financiers).

C’est ce que confirme Pascal Mayer, de la Société forestière de la CDC : «Le GFI répond à une attente des investisseurs qui ne trouvent pas suffisamment de forêts à vendre sur un marché de forêts de plus de 100 ha d’une centaine seulement dont 50 répondant vraiment aux critères exigés. Le GFI permet d’accroître la taille des patrimoines gérés donc de réduire les risques techniques et de minimiser les charges de structure, tout en faisant bénéficier les investisseurs de la protection spécifique aux fonds alternatifs.»

Parmi les sources possibles de financement de la filière, la Banque publique d’investissement (BPI) joue un rôle prépondérant depuis 2009 a expliqué Vanessa Giraud, référent bois à BPI France. «Le premier fonds d’investissement, le Fonds bois, a été créé avec 12 millions d’euros et a permis de financer 9 entreprises pour des projets d’investissements productifs dans la première transformation. Il a eu un effet de levier de 10 sur les investissements financés, un score remarquable, une vraie surprise !» BPI France lance un deuxième fonds d'investissement dans la première et deuxième transformation du bois avec la possibilité d'investir dans le secteur du meuble, et la possibilité de faire des opérations de transmission (donc du rachat de titres). Le fonds a une taille à ce jour de 27 millions d’euros (25 millions d’euros de BPI France, 1 million d’euros de l’Unifa, 1 million d’euros du Codifab) et a réalisé son premier investissement en septembre.

La filière dispose enfin d’un outil original créé par Fransylva il y a cinq ans, les «Business Angels» de la forêt, a rappelé Eric Toppan, secrétaire général de For’invest BA. «Les 200 propriétaires forestiers de l’association ont levé 150 millions d’euros en 2014 (deux fois plus qu’en 2013). Cette forme très populaire de financement participatif pourrait se développer beaucoup plus si l’on compare avec ce qui se fait dans d’autres pays.»

«Il n’y a pas d’industrie du bois sans une organisation de la ressource, il n’y a pas de forêt de production sans gestion durable et il n’y a pas de forêt dynamique sans capitaux d’investissements suffisants», tels sont les termes de l’équation à résoudre, avait annoncé en introduction Pierre Achard, président de l’Assfor. Le colloque a confirmé que la forêt française pouvait conjuguer gestion durable et productivité de la forêt, et jouer à plein son rôle de réduction des émissions de GES. Un rôle qu’elle ne pourra assurer que si elle retrouve le chemin de l’investissement…

Nathalie Jaupart Chourrout

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