Le 17 septembre 2020, la Commission européenne a annoncé par la voix de sa présidente Ursula von der Leyen dans son premier discours sur l’état de l’Union européenne son intention d’entamer une révision à la hausse des objectifs climatiques de l’UE à l’horizon 2030 afin d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050 : tous les secteurs de l’économie de l’UE devront intensifier leurs efforts pour réduire les émissions de gaz à effet de serre de 55% à la fin de la décennie actuelle par rapport aux niveaux de 1990.
Les principales fédérations européennes représentant le secteur forêt-bois ont commenté cette annonce. Celle du secteur papetier, la Confédération européenne des industries papetières (Cepi) – 18 associations nationales représentant 500 entreprises et 895 usines – a souligné que son secteur industriel a un intérêt stratégique à être à la pointe dans cette réduction, ce dans quoi elle s’investit. Elle a souligné toutefois une inquiétude relative à une double ambition vis à vis de la forêt : promouvoir la séquestration du carbone en forêt et promouvoir la récolte du bois à des fins économiques. À ce sujet elle craint que des secteurs industriels utilisent la compensation en forêt pour continuer à émettre (y compris par l’importation, ce qui signifierait qu’elles exportent la dégradation de l’environnement…). Le Cepi s’oppose à ce que la forêt soit utilisée par certains secteurs industriels comme le moyen de ne pas dé-carboniser leur process. Selon le Cepi, il ne faut pas se fier au puits forestier, ce que prouve la récente crise des scolytes. En revanche, selon l’organisme, la substitution par des produits forestiers est à prendre en compte, ce que n’a pas fait le nouveau plan 2030 (qui met par contre l’accent sur l’économie circulaire).
Même son de cloche du côté de l’Association européenne des forêts étatiques (Eustafor) qui soutient l’ambition climatique de l’UE mais considère que «le nouveau Plan objectif climat 2030 aborde les forêts de manière très simpliste, considérant les forêts principalement comme des puits de carbone, avec un rôle de compensation des émissions causées par d’autres secteurs». Eustafor insiste sur l’égale importance des trois types de contribution des forêts à la réduction des impacts du changement climatique : puits (séquestration du carbone), stockage (dans les arbres vivants et dans les produits bois) et substitution (aux combustibles fossiles et aux matériaux consommateurs d’énergie).
Dans un communiqué commun, la Confédération européenne des industries du bois (CEI-Bois), la Fédération européenne des panneaux (EPF), la Fédération européenne de l’industrie du parquet (FEP), l’Organisation européenne des scieries (EOS) – 180.000 entreprises en Europe, 240 milliards d’euros de CA – se sont, elles, avant tout réjoui du propos d’Ursula von der Layen : «Nous savons que le secteur de la construction peut même être transformé d’une source de carbone en un puits de carbone si des matériaux de construction organiques comme le bois et des technologies intelligentes comme l’intelligence artificielle sont utilisés». Les industries du bois européennes ont dit avoir hâte d’engager un dialogue avec les décideurs politiques sur la meilleure façon d’aider leur potentiel à se révéler, au moyen de mesures et d’outils carbone déjà établis, et sans imposer de charge administrative ou économique supplémentaire au consommateur final ou aux petites et moyennes entreprises.
Pour rappel, le gouvernement français a lancé le 10 septembre deux appels à projets et un appel à manifestation d’intérêt en soutien à la «décarbonation» de l’industrie. Intitulés «Aides à l’investissement et au fonctionnement pour soutenir la décarbonation de l’industrie», ils sont ouverts jusqu’au 20 octobre (AP) et au 9 novembre (AMI) prochains. Les financements émaneront du volet «décarbonation» de l’industrie du plan France relance, doté d’une enveloppe de 1,2 milliard d’euros d’ici 2022. Les appels concernent la production de chaleur renouvelable, l’efficacité énergétique, la recherche et développement.
L’appel à projets «chaleur renouvelable» s’adresse aux entreprises du secteur industriel, agricole et tertiaire privé, pour une installation de production de chaleur à partir de biomasse en substitution à des énergies fossiles de plus de 12.000 Mwh/an.
L’appel à projets «efficacité énergétique» concerne l’efficacité énergétique des procédés et des utilités dans l’industrie (les activités tertiaires et entités industrielles de production et mise sur le marché d’énergie sur le réseau sont exclues).
L’appel à manifestation d’intérêt «Évolution des procédés au service de la décarbonation dans l’industrie : électrification, nouveaux usages matières» concerne des projets de mise en œuvre de solutions et technologies ayant dépassé le stade de la R&D et matures pour entrer dans une utilisation industrielle.
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