Le Label bas carbone, lancé en 2019 par le Ministère de la transition écologique, vise à permettre un financement privé (en vue d’une compensation d’émissions ou d’un gain en image) pour des stockages de carbone «au-delà des pratiques usuelles». Les acteurs volontaires de la lutte contre le changement climatique se voient ainsi « récompensés » (par cette perspective de financement privé).
Son usage en forêt a été développé par le Centre national de la propriété forestière. En effet, si le Label bas-carbone vise à susciter le développement de projets dans tous les secteurs (forêt, agriculture, transports, bâtiment, etc.), le secteur forestier a été le premier, avec le secteur agricole, à plancher sur des méthodes. Trois méthodes forestières ont déjà été élaborées, développées par le Centre national de la propriété forestière (CNPF), puis validées par le ministère de la Transition écologique (et annexées au Label bas carbone). Elles sont relatives aux projets volontaires de conversion de trois types :
- le boisement de terres agricoles ou de friches embroussaillées ;
- la reconstitution de forêts dégradées (tempête, incendie, dépérissement intense) ;
- la conversion de taillis bien venants en futaies sur souches.
Les quantités de carbone stockées sont comptées sur 30 ans. En conséquence, la durée d’un projet est de 30 années et le porteur de projet doit donc s’engager à maintenir l’état boisé sur le terrain pendant au moins cette durée. Le CNPF assure le déploiement du Label bas carbone pour les propriétaires privés dans tout le territoire. Il a déjà labellisé 50 projets (avec des financeurs comme le groupe La Poste, Amaury sport organisation (Tour de France), TDV industries, le Centre hospitalier de Nontron, le groupe Vicat, Ciments Calcia, la banque Neuflize obc, Codeo, MTB events, IAE Paris – Sorbonne business school, Engie solutions, Dim, le ministère de la Transition écologique, Scaouest E.Leclerc, G7 de Biarritz…).
Après la forêt privée, la forêt publique rejoint le train du carbone. L’ONF s’est adressé ce début d’année aux entreprises et collectivités pour leur annoncer qu’elles pouvaient via l’office financer des projets labellisés bas carbone de reconstitutions de peuplements dégradés en forêt publique, consistant en « réalisation de plantation, engagement en faveur de la biodiversité et de l’environnement, remplacement de peuplements détruits par la sécheresse, des maladies et attaques d’insectes... ».
Sept projets ONF ont déjà été financés :
En Grand-Est : Eurazeo a financé la replantation de la forêt domaniale de Ternes où des peuplements résineux scolytés sont remplacés par un mélange d'essences (chêne sessile, chêne pédonculé, chêne pubescent, pin laricio de Calabre et sylvestre) avec des feuillus divers en accompagnement (alisier torminal, pommier, poirier, tilleul, érable champêtre et aulne glutineux…), sur 19 hectares, pour un volume carbone généré attendu de 3 078 tonnes.
En Auvergne Rhône-Alpes, Wenow a financé la replantation de la forêt départementale de la Pyramide, soit un reboisement de 5,3 hectares avec des essences plus adaptées au changement climatique comme le cèdre, le pin laricio, le pin de Salzmann, le pin Jeffrey et de Calabre, avec des essences feuillues en accompagnement comme le hêtre, le cormier, le tilleul, l’alisier et le charme, pour 722 tonnes de carbone généré attendues. Vinci a financé la replantation de la forêt départementale de la Cantinière : le projet sur 3,6 hectares prévoit de remplacer les sapins (qui souffrent du changement climatique) par des essences d’avenir plus adaptées, pin de Salzmann, pin de Brutie (deux pins méditerranéens) et douglas, indique l’ONF, avec complément en essences feuillues, chêne pubescent et tilleul, pour un « volume carbone généré de 650 tonnes ».
En PACA, la Fédération française de tennis a financé la replantation de la forêt communale de Belvédère 1 sur 1 hectares (80 tonnes de carbone attendues) suite aux dégâts d’une forte tempête en 2015, et celle de la forêt domaniale de Toulourenc (reconstitution de 7,5 ha fait suite à une coupe sanitaire réalisée début 2020 dans un peuplement de pin sylvestre dépérissant, lié à la présence très importante de gui, pour 849 tonnes). L'Occitane a financé la replantation de la forêt domaniale du Cousson, de 9,7 hectares, ayant subi des dépérissements intenses de ses pins sylvestres, pour un volume carbone généré de 1 139 tonnes.
En Occitanie, Danone a financé la replantation sur 11,7 hectares, en douglas, pin sylvestre, cèdre et feuillus, de la forêt domaniale de Somail, plusieurs parcelles de la forêt ayant subi des dépérissements massifs d’Abies grandis et de Picea sitchensis à cause de fortes sécheresses. 1 550 tonnes sont attendues.
30 projets sont en attente de financement : les forestiers vont devoir se transformer en VRP carbone !
L’ONF précise que la plupart des projets lancés constituent des projets pilotes de renouvellement forestier face à un phénomène de dépérissement, et que les essences testées seront suivies par le département recherche et développement de l’ONF.
Le CNPF pour sa part, avec une quinzaine d'acteurs du secteur, a alerté dans une tribune sur le risque de greenwashing et l'importance de la crédibilité des projets. En effet, avec l’annonce par de nombreuses entreprises de leur course à la neutralité carbone, la compensation va être très sollicitée.