La loi Climat et résilience est ce à quoi a abouti la Convention citoyenne pour le climat (150 citoyens tirés au sort se réunissent pendant 9 mois pour faire des propositions pour le climat), lancée en octobre 2019. Un projet a été présenté en Conseil des ministres en février 2021, envoyé en première lecture à l’Assemblée nationale en mars-avril 2021, au Sénat en juin 2021, et le texte amendé adopté le 20 juillet 2021, avant d’être promulgué le 24 août 2021.
« Cette loi n’agira pas seulement sur les structures de l’économie pour en accélérer la décarbonation, elle innervera notre culture, en favorisant l’éducation à l’environnement, une publicité responsable, une consommation plus sobre », s’est félicitée la ministre de la Transition écologique. « Elle vient ainsi compléter et accélérer les grandes lois de ce quinquennat sur l’écologie comme la loi agriculture et alimentation, la loi énergie climat, la loi d’orientation des mobilités ou encore la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire ; ainsi que le plan de relance, qui intègre un montant inédit de 30 milliards d’euros d’investissements verts sur les deux prochaines années ».
La loi comprend 291 articles répartis en 8 titres.
Le Titre 1 (Atteindre les objectifs de l’Accord de Paris et du Pacte vert pour l’Europe) est un article préliminaire voulu par le Sénat rappelant les engagements climatiques européens et internationaux de la France.
Les objectifs du Titre II, intitulé « Consommer », sont selon le Gouvernement d’« accompagner durablement les Français dans leurs choix de consommation, grâce à des mesures portant sur l’éducation à l’environnement, la publicité, l’affichage environnemental et l’économie circulaire ».
Les objectifs du Titre III, intitulé « Produire et travailler » sont de « rendre les investissements publics plus verts, faire de l’écologie un sujet transversal de dialogue social en entreprise, permettre le développement harmonieux des énergies renouvelables au niveau local ou encore réformer le code minier ».
Les objectif du Titre IV, intitulé « Se déplacer » sont de « rendre nos moyens de transports moins polluants, que ce soit les transports en commun, la voiture ou encore le transport aérien pour baisser les émissions de CO2 et améliorer la qualité de l’air ».
Les objectifs du Titre V, intitulé « Se loger » sont de « rénover massivement les logements pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre et sortir des millions de ménages de la précarité énergétique ».
Les objectif du Titre V, intitulé « Artificialisation des sols » sont d’« adapter les règles d’urbanisme pour lutter efficacement contre l’étalement urbain dans le but de protéger nos écosystèmes et d’adapter nos territoires aux changements climatiques ».
Les objectifs du Titre VI, intitulé « Se nourrir » sont d’« enclencher un changement significatif dans notre manière de nous nourrir pour consommer plus local, plus durable et plus sain, soutenir un système agricole plus respectueux de l’environnement par le développement de l’agroécologie et mieux encadrer le commerce équitable ».
L’objectif du Titre VII, intitulé « Renforcer la protection judiciaire de l’environnement » est d’« avoir une meilleure protection judiciaire de l’environnement en renforçant les peines pour qu’elles soient plus dissuasives et en créant un délit d’écocide ».
Produits bois et transformateurs du bois favorisés ?
La communication, de même que la labellisation-certification-normalisation (création d’un écoscore pour afficher l’impact sur l’environnement des biens et services consommés par les Français), est au centre des mesures du Titre II intitulé « Consommer ». Il n’y a pas d’absolu en ces notions et la porte est ouverte au lobbying ; les « informations écologiques », que le Gouvernement dit être réclamées par les Français, sont sujettes à l’immixtion d'acteurs divers. « À l’issue d’expérimentations sur chaque type de produits et services, l’affichage de l’impact sur l’environnement, notamment sur le climat, sera uniformisé et obligatoire », indique le Gouvernement. Affichage uniformisé suppose critères uniformisés ; or on sait combien ce projet est ambitieux et pose question. Il faut se rappeler à ce sujet la remarque formulée par l’Afnor dans dans un communiqué du 5 janvier 2021 : «L’effervescence des initiatives et de communication sur la neutralité carbone interroge», notait l’organisme français de référence pour les normes volontaires. «Pour soutenir concrètement les politiques publiques et limiter le green washing, l’ISO prend l’initiative de réunir les professionnels du monde entier et la France est appelée à y participer, via l’Afnor. Si l’expression «mal nommer les choses, c’est apporter du malheur au monde» devait trouver une nouvelle illustration, c’est bien sur la question de la neutralité carbone. L’urgence climatique impose aujourd’hui de partager un même langage pour ce type de déclaration environnementale et c’est tout l’enjeu d’un projet de norme en cours à l’Organisation internationale de normalisation (ISO), à l’initiative du Royaume-Uni. La future norme volontaire ISO 14068 porte une ambition : favoriser une compréhension commune de la neutralité carbone et des méthodes pour y contribuer, à l’échelle des organisations publiques et privées»...
Le verdissement de la commande publique (Titre III) a partie liée en quelque sorte avec la normalisation-certification. Le chemin est semé d’embûches pour les produits bois dont les fabricants pourraient aspirer à faire valoir un « score écologique ». Mais l’ Article 36 prévoit une « obligation, à partir du 1er janvier 2030 de l’utilisation de matériaux biosourcés ou bas-carbone dans au moins 25 % des rénovations lourdes et constructions relevant de la commande publique ».
La réduction des émissions du transport routier de marchandises impactera la filière bois. Le texte, rappelle le ministère de la Transition écologique, fixe notamment un objectif de suppression progressive de l’avantage fiscal sur la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) entre 2023 et 2030, ou encore donne la possibilité aux régions qui subissent du report de trafic dû à une contribution instaurée dans un territoire limitrophe de mettre en place une contribution spécifique sur le transport routier de marchandises sur leur réseau routier dès 2024. Il rend également obligatoire une formation régulière à l’écoconduite pour les transporteurs routiers pour diminuer les émissions de chaque trajet. Par ailleurs, il fixe des objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre des transports utilisés par les entreprises en amont et en aval de leurs activités. Enfin, le texte instaure un objectif de fin de vente des poids lourds thermiques d’ici 2040, donnant ainsi pour la première fois une perspective quant à la fin de leur commercialisation.
Les mesures liées à la rénovation des logements devraient avoir un effet sur la filière. Dès 2023, les propriétaires de passoires thermiques seront obligés de réaliser des travaux de rénovation énergétique s’ils souhaitent augmenter le loyer de leur logement en location. Dès 2025, il sera interdit de louer les passoires thermiques les moins bien isolées (classées étiquette G), et dès 2028 pour le reste des passoires (classées F). Et à partir de 2034, ce sont les logements classés E qui seront interdits à la location. « Le locataire pourra alors exiger de son propriétaire qu’il effectue des travaux et plusieurs mécanismes d’information, d’incitation et de contrôle viendront renforcer ce droit pour le locataire », note le Gouvernement, qui précise aussi que « tous les ménages, même ceux dont les revenus sont les plus modestes, auront accès à un mécanisme de financement pour régler le reste à charge de leurs travaux de rénovation. Cela pourra notamment passer par des prêts garantis par l’État ».
La forêt visée… et le code forestier !
Les articles 47 à 55 du Chapitre III (Protéger les écosystèmes et la diversité biologique) du Titre III (Produire et travailler) visent directement la forêt :
Article 47 | Meilleure intégration des objectifs de lutte contre le dérèglement, de renforcement de la résilience de la forêt et de préservation de la biodiversité en rééquilibrant les articles de principe du code forestier et de la politique forestière nationale
Article 48 | Définition des modalités du débroussaillement par le maire ou président d’EPCI
Article 49 | Rapport évaluant l’impact des paiements pour services environnementaux
Article 50 | Programme des coupes et travaux des propriétaires forestiers à présenter selon les codes des bonnes pratiques sylvicoles
Article 51 | Promotion de l’utilisation de bois d’œuvre, en favorisant sa transformation industrielle sur le territoire de l’Union européenne afin d’optimiser le bénéfice de son stockage de carbone
Article 52 | Réglementation de la profession d’exploitant forestier qui ne transforme pas le bois acheté au sein de l’Union européenne
Article 53 | Stratégie nationale pour adapter la forêt au dérèglement climatique
Article 54 | Prise en compte de la stratégie d’adaptation des forêts lors de l’évaluation à mi-parcours du programme national de la forêt et du bois
Article 55 | Inventaire forestier dans tous les espaces ultramarins
L’article 32 du Chapitre I (Verdir l’économie) du Titre III prévoit quant à lui la « cohérence entre la stratégie nationale de recherche et la stratégie nationale bas carbone et la stratégie nationale pour la biodiversité ». Tout un programme, qui conduit, de même que nombre des dispositions « forêt » à noter que tout dépendra des critères retenus plus tard pour « évaluer » et « normaliser ». Et donc des experts, pas des législateurs…
À noter que l’article 290 du Titre VIII (Dispositions relatives à l’évaluation climatique et environnementale) prévoit (Article 290) un rapport du Gouvernement sur les métiers en tension en rapport avec la transition écologique et l’offre de formation initiale et continue en la matière.
Un calendrier de mise en œuvre des principales mesures accompagne le texte de la loi, dont le ministère de la Transition écologique a fourni un résumé.