Dans un communiqué daté du 11 juillet 2022, elle a tenu à commenter ce texte qu’elle estime être très défavorable à la gestion forestière actuellement pratiquée. « La dernière version disponible des amendements de compromis au rapport COM ENVI sur la déforestation et la dégradation des forêts suggère d'ajouter la conversion des forêts dans le champ d'application du règlement dans un contexte similaire à celui de la déforestation et de la dégradation des forêts », selon Eustafor. « Une telle proposition élargit considérablement le champ d'application du règlement sans les consultations préalables nécessaires avec les experts forestiers, risquant ainsi d'exclure de manière significative une majorité de mesures sylvicoles. Si la conversion des forêts est interprétée de la même manière que la conversion des écosystèmes à la suite de cette proposition, le règlement deviendra un obstacle aux pratiques de gestion forestière nécessaires, y compris celles pour l'adaptation au climat. En outre, le règlement deviendra un outil de régulation et de limitation de la gestion forestière, sapant les dispositions légales des États membres et allant à l'encontre des principes de subsidiarité et de proportionnalité ».
« Changer la composition, la structure et la fonction des écosystèmes forestiers est souvent fondamental pour rendre les forêts résilientes au changement climatique. Ces mesures sont soigneusement planifiées en fonction des conditions locales et des recommandations scientifiques. Elles permettent le processus de conversion des peuplements qui est intégré dans de nombreux objectifs de politique forestière des États membres. Si cette proposition est retenue, l'adaptation des forêts au changement climatique deviendra presque impossible et la gestion durable des forêts deviendra un concept du passé », prévient Piotr Borkowski, directeur exécutif d'Eustafor.
Eustafor déplore que la proposition originale COM ENVI pour la définition de la dégradation des forêts ait été remplacée par une proposition alternative qui est trop générale et laisse beaucoup de place à l'interprétation. L’association estime que « sans indication de temps, presque toute intervention humaine dans les forêts pourrait être considérée comme une dégradation, ce qui est clairement faux. Les opérations de gestion forestière telles que la récolte ne représentent qu'une étape dans le cycle complet de la gestion durable des forêts. À court terme, ces opérations pourraient entraîner une réduction des indicateurs mentionnés, mais les sites forestiers se rétablissent et ne se dégradent pas à long terme ».
Étant donné que le champ d'application du règlement est assez large et que les secteurs respectifs opèrent dans des réalités différentes, Eustafor estime que les produits couverts par ce règlement devraient être traités via des lignes directrices différentes. « Dans le cadre du règlement, la sylviculture – avec le bois comme produit phare – se distingue beaucoup des autres secteurs en ce qui concerne les systèmes de gestion mis en place, la disponibilité des données, mais aussi les systèmes de suivi et de contrôle. Le point de départ est donc différent. Dans la mesure du possible, les lignes directrices devraient s'appuyer sur les outils existants, tels que ceux inclus dans le RT de l'UE, et sur les législations forestières nationales déjà en place. » Eustafor considère comme indispensable l'inclusion des experts des États membres et de la recherche forestière dans la définition des lignes directrices annoncées. Ce rôle ne devrait pas être exclusivement délégué à la Commission, selon l’association.
Par ailleurs, Eustafor considère comme assez problématique la suggestion d'habiliter la Commission à adopter des actes délégués pour imposer des polygones comme seul moyen de géolocalisation lorsque les parcelles atteignent une certaine taille. « Malheureusement, cette demande est formulée sans consultation appropriée des experts forestiers en ce qui concerne l'élaboration de la méthodologie, sa faisabilité et les lacunes potentielles dans chacun des secteurs couverts. En outre, la géolocalisation et la télédétection ne doivent pas remplacer l'analyse des données de terrain et des pratiques de gestion mises en place ainsi que les exigences du système de gouvernance locale avant que des conclusions n'aient été tirées. »
« Les politiques de l'UE devraient œuvrer à la promotion d'une gestion durable et multifonctionnelle des forêts dans le monde entier et ne pas créer d'obstacles à sa mise en œuvre », conclut l’organisme.