L’Office fédéral de la statistique (OFS) en Suisse a publié en fin d’année dernière, comme chaque année, son bilan statistique sur l’économie forestière en Suisse, se rapportant à l’année 2016. D’où il ressort que la Suisse, avec ses 1,27 million d’hectares de surface forestière, a récolté 4,46 millions de m3 en 2016. Une récolte totale en baisse par rapport à l’année 2015, mais en hausse pour le bois-énergie, deuxième récolte après celle des grumes.
La forêt suisse couvre près d’un tiers de la superficie du pays. En termes de volume récolté, la Suisse se rapproche de la Bourgogne-Franche-Comté, qui affichait en 2015 (Memento FCBA 2017) une récolte de 4,73 millions de m3 (pour une surface de 1,72 million d’hectares). Dans la continuité du massif français, le massif jurassien helvétique représente 18% de la surface forestière suisse. Il s’agit de la seule région forestière avec le Sud des Alpes où la récolte croît. D’une manière générale, la mobilisation en Suisse a reculé, comme l’indique le service statistique forestière de l’OFS dans son commentaire sur les chiffres 2016 : «Une récolte de bois à son niveau le plus bas depuis dix ans».
S’élevant donc à 4,46 millions de m3, elle a reculé de 2% par rapport à 2015. 93.000 m3 ont été récoltés en moins. La récolte de grumes est celle qui a le plus baissé, de 4% (à 2,21 millions de m3) quand la récolte de bois-énergie s’est légèrement accrue (+1% à 1,74 millions de m3). C’est surtout la récolte de plaquettes qui a poursuivi sa tendance ascendante, remarque l’OFS, pour atteindre en 2016 un niveau record de 0,99 million de m3 (+6,5%), quand la récolte de bûches a baissé de 6% pour tomber à son niveau le plus bas depuis dix ans. La récolte du bois d’industrie, troisième assortiment le plus important, est restée inchangée par rapport à l’année précédente. «La diminution de l’importance des grumes au profit de celle du bois d’énergie, une tendance que l’on observe depuis longtemps, s’est ainsi maintenue en 2016», commente le service statistique forestière de l’OFS. Rappelons que la stratégie énergétique 2050 pour la Suisse et son scénario Nouvelle politique énergétique (NEP) prévoit que le bois, contrairement à la situation actuelle, sera de plus en plus utilisé pour la production d’électricité à moyen et long terme (jusqu’à 2050). Le scénario prévoit aussi que la mise en œuvre du bois pour la production de chaleur devrait par contre fortement reculer.
Le scénario prévoit enfin une forte croissance des biocarburants. «Cela suppose une augmentation de la demande pour le bois», commentait l’Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage (WSL) dans un article intitulé «Potentiels, opportunités et risques de l’exploitation du bois-énergie» (contribution au Forum für Wissen 2014). «Mais le scénario ne dit rien sur les matières premières prévues pour les biocarburants. Pour quelle forme d’énergie le bois sera-t-il utilisé ? Ce sera finalement une décision locale, sur la base de sa compétitivité par rapport à des alternatives technologiquement possibles», concluait le WSL.
Les forêts privées actives
Le fort recul de la récolte de bois dans les forêts privées suisses observé entre 2014 et 2015 (-16%) s’est nettement atténué l’année suivante (-1%) tandis que dans les forêts publiques par contre (notamment les communes politiques, les communes bourgeoises et les corporations), la récolte a diminué de 2,5% en 2016. «La situation financière des exploitations forestières reste tendue», commente l’OFS, s’appuyant sur les chiffres du réseau des exploitations forestières de l’Office fédéral de l’environnement (Ofev).
Le «réseau d’exploitations forestières» de la Suisse est constitué d’un échantillon de 200 entreprises forestières publiques du Jura, du Plateau, des Préalpes et des Alpes, qui a pour but de représenter en détail la situation économique de ces entreprises forestières, et ainsi d’en induire des conclusions pour l’ensemble de la branche (les exploitations forestières en Suisse (organisées sous forme d’entreprise) assurent la moitié de la récolte des forêts publiques, les petites forêts non organisées sous forme d’entreprise assurant l’autre moitié). «En 2016, le prix du bois brut, la principale source de revenus des exploitations forestières suisses, a reculé de 1,7% selon l’indice suisse des prix à la production.
Tant les recettes d’exploitation (495 millions de francs) que les dépenses d’exploitation (530 millions de francs) se sont réduites de 25 millions de francs suisses en 2016 par rapport à l’année précédente. Cela tient aussi bien à la baisse des prix du bois qu’à une commercialisation plus importante du bois de chauffage au détriment de celle des grumes, vendues plus chères. La majorité des exploitations forestières ont enregistré un déficit, comme l’année précédente. A l’échelle nationale, le découvert a totalisé 35 millions de francs suisses», indique l’OFS.
Selon les chiffres de 160 exploitations «pilotes» du réseau des exploitations forestières, le déficit s’est élevé en 2016 à 64 francs par hectare dans la gestion des forêts (abattage du bois et entretien des forêts). «Malgré une baisse de coûts pour l’abattage, il manquait aux exploitations pilotes environ 5 francs par m3 pour la récolte du bois. Il n’y a que dans les zones forestières Plateau et Jura que la récolte de bois 2016 a suffi à couvrir les coûts, avant déduction des autres coûts d’exploitation (entre autres entretien des forêts, desserte forestière ou administration). Les prestations de service fournies en 2016, telles que les travaux communaux ou les abattages spéciaux dans des jardins, ont pu être assurées en couvrant les coûts pour la majorité des entreprises pilotes.»
Fabienne Tisserand