La Confédération européenne des propriétaires forestiers (CEPF), les Agriculteurs et coopératives agricoles européens (Copa-Cogeca), l’Organisation européenne des propriétaires fonciers (Elo), l’Association européenne des forêts domaniales (Eustafor), la Fédération européenne des communes forestières (Fecof), l’Union des sylviculteurs d'Europe du Sud (USSE) ont présenté une position commune à au sujet de la stratégie forestière européenne, réclamant « des objectifs clairs et et des actions cohérentes et réalisables ». « Les propriétaires et gestionnaires forestiers européens étaient parmi les plus actifs et les plus favorables à une nouvelle stratégie et convaincus qu'elle était nécessaire pour mieux relever les défis et les opportunités du secteur et pour atteindre les nouveaux objectifs du Green Deal grâce à un cadre cohérent et bien coordonné au niveau de l'UE. Cependant, ces espoirs ont été anéantis avec la nouvelle stratégie », a exprimé le groupe des organisations. Selon lui le projet de stratégie, « sape l'équilibre actuel des piliers sociaux, environnementaux et économiques de la foresterie durable et multifonctionnelle dans l'UE ».
Stratégie européenne versus traditions
D’une manière générale, les organisations estiment que l'approche de la stratégie ne correspond pas aux réalités du terrain. Elles insistent sur le fait que « contrairement à ce qu'implique la stratégie, il n'y a pas de manière unique de gérer les forêts dans l'ensemble de l'UE ». « Nous voudrions rappeler que la foresterie multifonctionnelle est une tradition européenne de gestion forestière profondément enracinée », précisent-elles. « Par conséquent, les propriétaires et les gestionnaires forestiers détiennent des connaissances et une expertise pour prendre soin de la biodiversité dans leurs forêts. Ils travaillent également à faire des forêts une ressource plus résiliente, vivante et croissante, ce qui en fait des contributeurs dynamiques aux économies locales et aux moyens de subsistance ruraux. »
Pour les syndicats réunis de propriétaires, l'importance de l'économie de la forêt et du bois est absente de la stratégie. « La conservation de la biodiversité, la restauration des écosystèmes et l'augmentation des puits de carbone sont les éléments dominants de la stratégie. Le manque de cohérence qui en résulte avec les objectifs climatiques et de croissance est l'un des points les plus problématiques de la stratégie. » Contre un seul soutien aux produits « à longue durée de vie », ils prônent un soutien à « l'ensemble de la gestion forestière active, y compris la production et la consommation d'autres produits à base de bois tels que le papier, les emballages et l'énergie ». Ils estiment que le soutien pour la fourniture « de services écosystémiques environnementaux et climatiques « ne devrait pas signifier négliger le soutien aux investissements dans les fonctions de production de bois des forêts ou remplacer les bases économiques solides de la foresterie ». Selon eux, ni la stratégie bio-économique de l'Union, ni sa stratégie industrielle, ni la directive sur les énergies renouvelables, ni les emplois verts ne sont favorisés par la stratégie forestière telle que présentée en juillet.
Nouveaux indicateurs de gestion durable
Quatre actions semblent inquiéter en particulier les organisations de propriétaires, qui s’en sont ouvertes dans un communiqué le 4 octobre : la mise en place de nouveaux indicateurs, seuils et fourchettes de l'UE sur la gestion durable des forêts ; un nouveau programme de certification volontaire de gestion forestière plus proche de la nature ; le développement du paiement des services écosystémiques ; une nouvelle proposition législative sur l'observation, la communication et la collecte de données des forêts de l'UE.
Concernant de nouveaux indicateurs, seuils et fourchettes de gestion durable des forêts (GDF) de l'UE, des éclaircissements sont demandés sur la manière dont ceux-ci seront liés au travail de la conférence ministérielle sur la protection des forêts en Europe (Forest Europe) - étant donné que l'UE et ses États membres sont signataires de Forest Europe –et sur la base juridique qui justifierait cette action, sur ce qu'impliquerait « commencer sur une base volontaire » concernant les futures étapes possibles, et sur le lien entre la GDF et le concept de « plus proche de la nature ».
Une évaluation préalable approfondie pour identifier le besoin et la valeur ajoutée d'un système de certification volontaire de gestion forestière plus proche de la nature de l'UE est également demandée, de même qu’une discussion sur le développement du paiement des services écosystémiques, car « propriétaires et gestionnaires forestiers n'ont pas encore été invités à contribuer aux travaux en cours de la Commission européenne sur l'agriculture et l'élimination du carbone et que le dernier rapport publié par la Commission n'inclut pas le secteur forêt ».
Quant à la nouvelle proposition législative sur l'observation, la communication et la collecte de données des forêts de l'UE, elle nécessite selon les organisations de propriétaires une évaluation en termes de valeur ajoutée, ainsi que relativement aux données et informations existantes et manquantes. « La subsidiarité, les coûts et les charges administratives sont des éléments clés qui doivent également être traités. La surveillance des forêts à l'échelle de l'UE pourrait apporter une valeur ajoutée à condition qu'elle soit soutenue par les États membres de l'UE et qu'elle se base sur des données de terrain collectées par les inventaires forestiers nationaux et s'appuie sur l'expérience de Forest Focus. En ce qui concerne les plans stratégiques nationaux, leur nature (volontaire ou obligatoire), leur format et leur objectif exact doivent également être clairs avant que cette action ne commence », indiquent-ils.
Intéressés au premier chef par la stratégie forestière, les propriétaires forestiers entendent que celle-ci s’adapte à leurs habitudes, quand la tendance de certains cercles de gouvernance tel celui du Forum économique mondial (forum de coopération publique privée) via son « grand reset », théorisé par Klaus Shwab, n’est pas à chérir la multitude des propriétaires, mais à une gestion globale des ressources, via les mécanismes financiers.