Conférer au bois une résistance supérieure à celle de la plupart des métaux et alliages de structure, et en faire une alternative légère, à faible coût et à haute performance, telle est l’ambition de plusieurs groupes de chercheurs. Un groupe chinois a publié en 2019 un article dans lequel il décrit la fabrication d’une sorte de lamellé-collé de bois délignifié (par cuisson dans une solution de soude caustique) et pressé, aux performances dix fois supérieures à celles du bois.
Les matériaux de construction synthétiques aux performances mécaniques exceptionnelles présentent soit un poids important et un impact environnemental défavorable (par exemple, aciers et alliages), soit des procédés de fabrication complexes et donc un coût élevé (par exemple, composites polymères et biomimétiques)», soulignaient dans la revue Nature en 2018 les chercheurs auteurs d’un article (1) intitulé : «Transformer le bois en un matériau structurel haute performance».
Ils présentaient dans celui-ci leur travail : la transformation du bois en un matériau aux performances équivalentes à celles de ces matériaux synthétiques (augmentation de plus de dix fois de la résistance). «Notre procédé en deux étapes consiste à éliminer partiellement la lignine et l’hémicellulose du bois naturel par un processus d’ébullition dans un mélange aqueux de NaOH et de Na2SO3 puis de soumettre le bois au pressage, ce qui entraîne l’effondrement total des parois cellulaires et la densification complète du bois naturel avec des nanofibres de cellulose fortement alignées. Cette stratégie est universellement efficace pour diverses espèces de bois.»
Naturellement, les recherches se poursuivent. En 2019, un groupe de chercheurs chinois (2) a franchi un pas supplémentaire en palliant un certain déficit du CBM (pour cellulose-based material, nom par lequel les chercheurs nomment ce type de bois délignifié-pressé), par le lamellage- collage. A partir du pin sylvestre de Mongolie, ils ont obtenu un matériau léger mais extrêmement solide. Les propriétés mécaniques extraordinaires du CBM sont principalement attribuées à la bonne orientation des fibres de bois dans le sens longitudinal et à des liaisons hydrogène accrues entre cellules adjacentes dues à l’élimination de la lignine et au pressage mécanique. Le «lamellé-collé de CBM» affiche une résistance à la traction allant jusqu’à 773 MPa et un module allant jusqu’à 21,7 GPa. La recomposition chimico-mécanique du bois pour en faire un matériau aux performances physiques égales à celle des plastiques, béton et métaux, si elle est aboutie en laboratoire, ne l’est pas encore à échelle industrielle.
ZOOM : Le bois comme du béton : Woodoo
Extraire la lignigne du bois c’est aussi ce que fait la start-up française Woodoo, membre de la «communauté French Tech Troyes» labellisée le 3 avril 2019. Mais pas dans le but de réorganiser ensuite les fibres de cellulose par pressage, mais dans celui de remplacer les vides ainsi produit par une résine végétale. Une autre manière de transformer le bois en matériau à hautes performances. «Notre bois devient aussi résistant que certaines classes de béton et permettrait de construire des tours jusqu’à 40 ou 50 étages», se réjouit le dirigeant Thimotée Boitouzet qui, architecte à la base, a étudié le bois au MIT où il a mis au point son procédé. L’ayant breveté, il a fondé Woodoo à Troyes en 2016.
Dans un premier temps c’est moins le secteur du bâtiment que les secteurs demandant de petites quantités de matière (luxe, intérieur automobile, sport...) qui sont visés. Le bois traité via la technologie Woodoo devient, outre trois fois plus résistant qu’à l’origine, translucide, imputrescible et plus résistant au feu, selon la société.