Depuis dix ans, d’infatigables pionniers s’attachent à valoriser le bois de hêtre de qualité secondaire en structure, un projet qui prend toujours plus de sens face à la nécessité d’une gestion parcimonieuse des ressources. Deux points d’orgues ont été posés en 2020 : l’ouverture de l’usine Fagus Suisse, la construction dans les Vosges de la Maison des hommes et des arbres à partir de murs, poteaux et poutres en bois croisé assemblé par picots de hêtre.
Alors que nombre de chercheurs se sont penchés sur la manière de déconstruire le bois via les biotechs, pour en faire un pétrole qualifié de vert dans le cadre d’une «bioéconomie» englobante et aux effets inconnus, d’autres, pragmatiques, étudient comment utiliser autrement le bois tel que les arbres le livrent via les moyens de production existant dans les territoires, dans le cadre de circuits économiques courts. Le bois de hêtre a tout particulièrement retenu leur attention car il présente des caractéristiques mécaniques impressionnantes. Or c’est un bois «sauvage», «auquel on ne peut prendre que peu de matière» – ainsi que le décrit un transformateur – et l’utiliser nécessite de la recherche et développement.
On ne s’étonnera pas que celle-ci ait vu le jour dans des régions riches en hêtre, France du Nord-Est, Suisse, sous l’impulsion de forestiers, de transformateurs et d’élus soucieux de valoriser leur filière bois massif et leur forêt multifonctionnelle, les deux faces d’une même médaille. «Transformer du bois de chauffage bon marché en un matériau de construction précieux», selon la formule de l’association suisse Lignum, est un noble programme : les difficultés n’en sont pas moins gigantesques ; mais possiblement dépassables, ce que prouvent cet automne deux jalons majeurs de ce cheminement vers une nouvelle filière de transformation du hêtre : le lancement de l’usine Fagus Suisse, la construction de la Maison des hommes et des arbres, dans le cadre de la démarche vosgienne Terres de hêtre, à Xertigny […]