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CBS : expertise des bois anciens et préconisations pour leur réemploi

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Un état des lieux de l'entièreté de la structure bois, pièce à pièce, a été effectué avant la formulation de préconisations pour chaque pièce et chaque assemblage.

Crédit photo J. Sylla
Grâce à la technologie développée par Concept bois technologie (CBT) incarnée dans les outils Sylvatest et Polux, Concept bois structure (CBS) offre de garder en place le maximum possible des bois d’un ancien bâtiment lors de sa réhabilitation, en garantissant que ceux-ci sont adaptés à leur nouvelle utilisation : il permet un usage efficient de la ressource bois, ce qui est aujourd’hui vital. Le bureau d’études bois vient grâce à son expertise et ses préconisations de redonner une seconde vie aux structures des Entrepôts des magasins généraux de Paris (EMGP), bâtiment de 150 ans transformé en hôtel Hilton aux très hautes performances acoustiques.

Concept bois structure (CBS) est un bureau d’études créé par Jean-Luc Sandoz, docteur ingénieur bois mondialement connu, passé par l’École nationale supérieure des technologies et industries du bois (Enstib) d’Épinal puis par l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL). Basé à Paris, il est une sorte de frère jumeau de Concept bois technologie (CBT), basé lui à Lausanne. Ils font partie d’un écosystème plus vaste (groupe CBS-Lifteam), comprenant Lifteam, entité qui traite les projets en phase travaux, soit en lots séparés, en macro-lots ou en tout corps d'état, et Ecotim (1), usine de préfabrication bois. La connaissance très poussée du matériau bois, et ainsi son usage optimisé, sont à la base de cet ensemble de sociétés dont les compétences se complètent.

CBT a été créé d’abord, comme spin-off de l’EPFL avec pour objectif de transférer dans le domaine pratique les travaux de recherche effectués par Jean-Luc Sandoz avec Julius Natterer, alors directeur de la chaire bois de l'EPFL (ils ont accompli un travail visionnaire qui a projeté le matériau bois dans l'approche des futurs Eurocodes). CBT a ainsi mis en application des savoirs sur la mesure physique des bois par les ultrasons (le sujet de la thèse de Jean-Luc Sandoz en 1990) et plus largement le contrôle non destructif des bois en développant notamment deux appareils de mesure, le Sylvatest et Polux. Le Sylvatest est un appareil portable permettant grâce à deux sondes entre lesquelles sont envoyés des ultrasons de connaître la résistance mécanique des bois (2). Polux mesure la fiabilité des poteaux bois en service, grâce à une prise de mesure hydrodensitométrique qui s’effectue à la ligne de sol, l’endroit où le poteau est le plus sollicité (3).

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Relevé de mesures au Sylvatest dans le cadre de la mission de CBS d'évaluation des structures des Entrepôts des magasins généraux de Paris.
Crédit photo : CBS
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Le Sylvatest. De 3 kg, il est passé à 300 g ! Les nouvelles versions ne mesurent plus seulement le temps de propagation des ultrasons, mais aussi l'amplitude, ce qui permet de repérer des trous, et, par exemple, de tester le lamellé-collé pour y détecter d'éventuels problèmes de collage. Désormais, un boîtier n'est plus nécessaire. La sonde sans câble auto-alimentée est capable d'envoyer les informations à une application gérée sur smartphone.
Crédit photo : CBS

CBS est lui un bureau d’études bois dont l’activité centrale est la conception et le dimensionnement de tous types de structures bois. Son expertise de haut niveau le porte plutôt vers le calcul de projets complexes et d’envergure (grandes portées, fortes charges). Il effectue la majeure partie de ses prestations d’études bois pour Lifteam, l’entité qui porte les projets de conception-construction.

De par sa fraternité avec CBT, CBS propose en parallèle une activité d’expertise structure sur des bâtiments existants. Analyse des bois et structures en place puis préconisations pour leur conservation dans le cadre d’une réhabilitation : telle est la prestation unique offerte par CBS en France (par CBT en Suisse), grâce à ses outils inédits de contrôle non destructif.

D’un entrepôt de 150 ans à un hôtel contemporain : le même bois !

Adrien Etchegaray, ingénieur de l’École supérieure du bois de Nantes, passé par le Centre des hautes études de la construction (CHEC) en spécialité bois, travaille à CBS depuis 2016 ; il en est le responsable des études depuis 2021. Il vient avec son équipe de donner une nouvelle vie aux structures bois des Entrepôts des magasins généraux de Paris, en train de devenir un hôtel Hilton haut de gamme. Pour la réhabilitation de ce bâtiment de plus de 150 ans à structure en bois feuillu et résineux, le projet architectural a prévu, selon la volonté du maître d’ouvrage, la conservation d’une bonne partie de l’organisation très tramée de l’espace, les cellules de stockage de 4 mètres par 4 mètres devant correspondre aux futures chambres, explique-t-il. La forêt de poteaux de chêne et de poutres en résineux devait ainsi être conservée. Or le respect des normes acoustiques américaines, plus exigeantes que les françaises, fut exigé par le maître d’ouvrage, le groupe Icade, et la maîtrise d’œuvre, l’agence Calq, ce qui a entraîné pour les planchers un surplus de 600 à 650 kg/m² de charge permanente. Que faire ? Le contrôle rigoureux des structures bois s’imposa de fait, et il fut fait appel à CBS pour d’une part expertiser la structure et d’autre part, faire des préconisations.

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Les structures bois des Entrepôts des magasins généraux de Paris ont été expertisées par CBS et renforcées selon ses préconisations pour devenir structures… de l'hôtel Hilton.
Crédit photo : J. Sylla

Un état des lieux de l’entièreté de la structure bois, en très bon état à certains endroits, dégradée à d’autres, a été réalisé grâce au Sylvatest, et à l’appareil Polux dans certains cas, ceci pièce à pièce : poutres (500 !), poteaux (plus de 260 !), bracons, sommiers. La campagne de mesure a duré trois mois, sachant que les mesures doivent s’effectuer en l’absence de vibrations et que le site était en chantier.

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Les préconisations ont été de trois types : aucun renforcement, renforcement de certaines pièces ou certains assemblages, remplacement par des pièces neuves de certaines pièces trop dégradées.
Crédit photo : J. Sylla

L’appareil Sylvatest et son cerveau logiciel − prenant appui sur une base de données concernant des bois similaires élaborée par CBS − ont permis de déterminer le classement mécanique des bois. L’analyse des résultats en parallèle de celle des structures existantes et de leurs fonctions à venir dans le bâtiment a conduit à des préconisations de trois types : aucun renforcement, renforcement de certaines pièces ou certains assemblages, remplacement par des pièces neuves de certaines pièces trop dégradées (une zone ayant été touchée par les termites), les moins nombreuses. D’une manière générale, la qualité des poteaux classés D70 et leur section ont permis la reprise des charges sans renforcement. Certaines poutres ont été renforcées par des flasques bois collées à la résine époxy. Des assemblages ont été renforcés par tiges filetées et résine époxy. Bois HD a accompagné CBS pour effectuer des tests en laboratoire afin de caractériser les renforcements par flasques collées à la résine époxy. « FCBA nous a accompagnés pour prélever et analyser des échantillons de bois attaqué par les termites. Nous avons également pu déterminer au moyen d’un appareil de détection acoustique que les termites n’étaient plus actifs », précise aussi Adrien Etchegaray. « Un autre des intérêts du Sylvatest », note-t-il, « a été de pouvoir déterminer la classe de résistance de pièces complètement recouvertes par de la peinture qui ne laissaient apparaître aucune singularité. Un sablage de tous les bois a par la suite été effectué, mais ce travail d’expertise a une nouvelle fois permis d’anticiper les travaux à prévoir et d’éviter toute mauvaise surprise qui aurait pu remettre en cause la réalisation du projet. »

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D'une manière générale, la qualité des poteaux classés D70 et leur section ont permis la reprise des charges sans renforcement.
Crédit photo : J. Sylla

Ce sont environ 90-95 % des bois qui ont ainsi pu être conservés, et qui répondent à la nouvelle configuration de bâtiment érigé dans un nouveau contexte normatif. « S’il n’est pas dégradé par des agents biologiques, le bois conserve toutes ses caractéristiques structurelles avec le temps : il ne mérite absolument pas l’image de matériau fragile qui lui est parfois allouée ; c’est un matériau du long terme », observe Adrien Etchegaray, qui note aussi que les dimensionnements d’il y a 150 ans ont été effectués largement. Dès lors, quel dommage cela aurait été de ne pas réemployer les structures existantes des entrepôts des magasins généraux de Paris !

Alors que la pression sur la ressource se renforce, induisant le souci d’épargner les matériaux neufs, l’expertise CBS devrait être de plus en plus courue, au regard du nombre de bâtiments anciens à structure bois. Elle a déjà été sollicitée de nombreuses fois, y compris en Chine pour l’examen des structures de la Cité interdite à Pékin ou celles de la Place Tian Fu, à Chengdu en 2006, en Roumanie pour l’expertise de celles du Palais de justice de Bucarest (2002), en Suisse, pour l’expertise des structures du Château de Valère (2001), de celles de l’Ancien hôpital (2012 et 2016) à Sion, de celles du Globe du CERN à Genève (2012), de celles de l’Hôtel Beau Rivage à Nyon (2018). En France, avant les structures des Entrepôts des magasins généraux de Paris, CBS a expertisé l’Hôtel des Invalides à Paris en 2005, l’Opéra de Strasbourg en 2008.

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Jean-Luc Sandoz, créateur et dirigeant de CBS-Lifteam, expertise les structures bois de la Cité interdite en 2006 et 2007.
Crédit photo : CBT
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Jean-Luc Sandoz, créateur et dirigeant de CBS-Lifteam, expertise les structures bois de la Cité interdite en 2006 et 2007.
Crédit photo : CBT
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Jean-Luc Sandoz, créateur et dirigeant de CBS-Lifteam, expertise les structures bois de la Cité interdite en 2006 et 2007.
Crédit photo : CBT
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Jean-Luc Sandoz, créateur et dirigeant de CBS-Lifteam, expertise les structures bois de la Cité interdite en 2006 et 2007.
Crédit photo : CBT

(1) Ecotim est un atelier qui produit des éléments préfabriqués en bois (charpentes, dalles, ossatures bois complètement intégrées), en vue de la réalisation de logements, bâtiments publics, commerciaux, industriels et agricoles.

(2) En effet, le temps de propagation des ultrasons entre deux points est corrélé aux propriétés mécaniques du bois, notamment sa densité : plus le bois est dense, plus les ultrasons se propagent rapidement. Un nœud, par exemple, favorise la déviation des ultrasons qui se trouvent ralentis. Simple… en apparence seulement ! Car une calibration nécessite d’être préalablement faite pour chaque essence, et chaque cohorte d’arbres, grumes, billons, éléments structurels de bois en service que l’on souhaite tester… Chaque type de mission de caractérisation nécessite de doter l’appareil d’un « nouveau cerveau », à savoir un modèle effectué à partir d’un échantillon des bois concernés, qu’il soit sous forme d’arbres sur pied, de grumes, de pièces sciées, d’éléments structurels dans des vieux bâtiments…

(3) Deux pointes sur capteurs de force enfoncées de part et d’autre du poteau permettent de calculer sa résistance, tandis que l’humidité est mesurée par passage d’un courant électrique. L’analyse des mesures recueillies permet de savoir si le poteau remplit sa fonction ou non ; si ce n’est pas le cas, de déterminer s’il doit être changé immédiatement ; de définir des priorités de remplacement ; de déterminer les risques associés à son changement (est-il possible de l’escalader ou non). La technologie Polux a été une révolution pour les gestionnaires de réseaux comme Enedis qui auparavant ne pouvait que taper sur les poteaux pour évaluer leur qualité, une mesure à tout le moins subjective…

CBT : expertise pour Notre-Dame de Paris

À l’heure de l’utilisation parcimonieuse et donc choisie de la ressource bois, le contrôle non destructif, spécialité de l’entreprise Concept bois technologie (CBT), est la voie rêvée pour s’assurer d’un usage approprié du bois, aussi hors norme soit-il, et à tout moment de son cycle d’utilisation (arbre sur pied, grumes, billons, bâtiment construit).

CBT commercialise le Sylvatest, son appareil de mesure de la résistance des bois par ultrasons, auprès de professionnels, par exemple des bureaux d’études. Une grande partie de son activité liée au contrôle non destructif avec le Sylvatest est toutefois de service : expertise pour des usagers du bois, qu’ils soient maîtres d’ouvrage, charpentiers, ingénieurs de bureau d’études, experts en assurance, etc. « Nous travaillons fréquemment sur des projets qui ne sont pas standard, nécessitant une connaissance d’une ressource particulière », souligne Yann Benoit, directeur technique de CBT. On ne s’étonnera pas dès lors que le bureau se soit vu confier le contrôle des pièces de chêne équarries de 20 m de long sélectionnées pour la reconstruction de Notre-Dame de Paris, qui ne sont pas d’un usage habituel à notre époque… CBT est intervenu lors de la mise en œuvre du projet AOC Bois de Chartreuse, pour suivre les caractéristiques des bois de la forêt (différentes localisations) au sciage. Il a été missionné récemment pour le projet de doublement par recouvrement de l’autoroute Lyon Saint-Étienne (projet Stent), pour lequel la volonté du maître d’ouvrage est d’utiliser, en dehors des habitudes, des gros bois locaux, qu’il conviendra de caractériser, de la forêt à l’ouvrage. CBT a œuvré à la caractérisation des bois de peuplier pour un usage en structure porté par les Hauts-de-France. Alors que croît la volonté des maîtres d’ouvrage publics d’avoir recours à leur propre ressource locale en bois, le contrôle non destructif est un précieux outil. « Avec le Sylvatest, nous mettons en œuvre une approche scientifique de la variabilité des caractéristiques des bois. Notre expérience nous permet de constater que d’une manière générale, le classement traditionnel notamment visuel conduit à sous-employer les bois », remarque Yann Benoit. Le contrôle non destructif permet de faire un usage le plus efficient possible des bois, ce qui devrait devenir, à une époque où le ressource se raréfie, un incontournable…

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