On relie la prolifération des scolytes, ces insectes parasites ravageurs qui mangent le cambium, situé sous l’écorce, de certains résineux (dont l’épicéa), à trois facteurs principaux, à savoir : l’augmentation de la température moyenne et les sécheresses répétées, les chablis, et des pratiques sylvicoles non adaptées.
L’épidémie de scolytes commencée en 2018 a marqué le pas en 2021 grâce à des conditions météorologiques favorables aux épicéas encore présents et défavorables au scolyte typographe. Il n’en demeure pas moins qu’un nombre significatif d’arbres ont été infectés, les deux zones françaises les plus touchées étant le Grand Est et la Bourgogne-Franche-Comté, qui fin 2021 totalisaient un volume cumulé estimé à 19 millions de m3, soit l'équivalent d'environ 55 000 ha et 32 % du volume de bois sur pied des pessières de plaine (sous 800 m d’altitude) (1).
Face à ce constat, l’institut technologique FCBA a réalisé une étude dont les résultats ont été récemment présentés au Pôle excellence bois de Rumilly (74), association dont la mission est, pour rappel, de renforcer les activités et la compétitivité de la filière bois des Pays de Savoie. Une occasion de souligner que l’utilisation de bois local a un impact économique et social non négligeable. À titre d’exemple, on estime qu’un groupe scolaire construit avec 600 000 € de « lot bois » peut générer, sur un an, jusqu’à 4 emplois à temps plein en aval de la filière et 1,25 emploi au niveau de l’amont.
Trois catégories testées
« L’idée fut de réaliser une étude de manière transversale à différentes étapes de transformation », résume Nathalie Mionetto, chargée de territoire Nord-Est pour FCBA. L’étude portait, en effet, sur la caractérisation des épicéas à différents stades de « contamination » : « frais » (peu contaminé) ; « vieux » (assez contaminé) ; et « secs ». Elle se décomposait en plusieurs phases, à savoir l’impact de l’attaque de scolytes sur les procédés de sciage, puis de séchage, et enfin de collage.
Les résultats ont été les suivants : Pour ce qui est des bois « frais » et « vieux », tant le rendement que la vitesse de sciage se sont vus diminuer. Les attaques modérées n’ont pas d’impact sur la tenue des finitions, contrairement aux attaques les plus fortes. Pour ce qui est du séchage et du procédé de collage, aucune variation n’a été constatée.
L’étude conclut qu’il est tout à fait possible d’utiliser les épicéas scolytés en construction, sous forme lamellée-collée notamment, les propriétés mécaniques du bois n’étant pas altérées. « Seul le bleuissement du bois, provoqué par un champignon qui accompagne les scolytes, peut avoir un impact esthétique », précise Nathalie Mionetto. Les conclusions de cette étude confirment l’intérêt d’exploiter rapidement les bois et de les sécher pour limiter les dégradations.
« Il est important de continuer de surveiller et gérer les forêts locales pour être en mesure de récolter rapidement les bois attaqués. La valorisation de ces bois en construction auprès de l’aval de la filière encouragera leur exploitation dans les 4 à 6 semaines suivant l’attaque, en vue de limiter la propagation du scolyte », estime la représentante de FCBA.
On notera que l’institut technologique a déjà prévu de réaliser un travail similaire avec l’objectif de caractériser les hêtres dépérissants.
(1) Source : ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation.